PL-59 : Ce qu’il faut savoir

Santé-sécurité au travail | 17 octobre 2021

PL-59 : Ce qu’il faut savoir

Mise à jour effectuée le 18 octobre 2021

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Nouvelle importante dans le milieu de la santé-sécurité du travail (SST): le projet de loi 59 (ou PL-59), qui avait été déposé en octobre 2020 à l’Assemblée nationale du Québec, a officiellement été adopté le 30 septembre dernier.

Si la nouvelle mouture de la loi prévoit des changements qui n’affecteront pas les travailleurs et les entreprises avant 2024, d’autres entrent en vigueur dès maintenant.

Rappelons que ce projet de loi vise la modification des deux lois principales encadrant la santé-sécurité au Québec : la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) et la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP). Ces lois jadis avant-gardistes n’ont bien sûr pas évolué au même rythme que le marché du travail. Leur mise à jour était plus que due, aux dires de plusieurs acteurs du milieu.

Voici les principaux aspects de cette nouvelle loi dont il vous faudra tenir compte dans votre prise en charge de la santé-sécurité.

Objectif #1 : prévention des accidents

La loi 59 a été écrite avec un objectif prioritaire en tête : encourager la prévention des accidents, et ce, par toutes sortes de moyens.

Les risques en milieu de travail ne pourront plus être ignorés, car la totalité des entreprises du Québec devront élaborer soit un programme de prévention, soit un plan d’action en santé-sécurité.

Et pas question de « tabletter » ces documents et de les laisser amasser la poussière. On prévoit des incitatifs financiers (tels qu’une éventuelle baisse des cotisations) de même qu’un « programme de certification » déployé par la CNESST pour encourager les entreprises à passer à l’action avec des mesures concrètes de gestion des risques.

Les amendes en cas d’infractions à la LATMP ont aussi été augmentées de manière non négligeable : jadis de 300 $ à 8000 $ pour une personne physique ou morale, elles peuvent désormais atteindre 10 000 $ pour une personne physique et 20 000 $ pour une personne morale.

Ainsi, des investissements en prévention deviendront vite rentables.

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« Cette réforme doit […] servir de levier pour que les milieux de travail adoptent une culture de prévention forte. »

— Jean Boulet, ministre du Travail

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Programmes de prévention

Toutes les entreprises devront, selon leur taille, se doter d’un programme de prévention ou d’un plan d’action SST.

De plus, toutes les entreprises comptant 20 employés et plus devront :

  • Former un comité SST
  • Identifier au moins un représentant en santé-sécurité
  • Inclure un programme de santé au travail dans leur programme de prévention

Les entreprises de moins de 20 employé(e)s devront, quant à elle :

  • Identifier un agent de liaison en santé-sécurité (ou dans certains cas, un représentant en santé-sécurité)
  • Mettre en application le programme de santé au travail correspondant à leur secteur d’activité (programme développé pour eux par la santé publique). Les organisations ne faisant pas partie de secteurs d’activités visés par de tels programmes n’auront pas à en développer un.

Les agents de liaison de même que les membres des comités santé-sécurité devront recevoir une formation dont le contenu et la durée restent à déterminer.

À noter que l’idée d’utiliser le niveau de risque lié au code SCIAN (risque faible, moyen ou élevé) pour déterminer les mécanismes de prévention à mettre en place avait été évoquée dans des versions préliminaires du PL-59. Elle n’a toutefois pas été retenue dans sa version finale.

Et le télétravail?

Plusieurs employeurs ignorent que la loi (autant l’ancienne que la nouvelle) s’applique durant les heures de prestation de travail, peu importe où celle-ci a lieu. Cela inclut le domicile d’un télétravailleur.

Or, dans la nouvelle loi 59, on mentionne désormais de manière explicite que l’employeur est responsable de sécuriser ces lieux. Il pourrait être nécessaire, par exemple, de faire une évaluation ergonomique des postes des personnes en télétravail afin de prévenir le développement de troubles musculosquelettiques.

Risques psychosociaux et violence

Une autre modification majeure proposée dans le projet de loi est l’ajout des risques psychosociaux à la liste des risques devant être considérés par l’employeur. Ainsi, des activités de prévention devront être mises en place pour en protéger les travailleurs, au même titre que les risques physiques, ergonomiques, chimiques ou biologiques.

Mais les risques psychosociaux, de quoi s’agit-il concrètement?

L’INSPQ les définit comme des « facteurs qui sont liés à l’organisation du travail, aux pratiques de gestion, aux conditions d’emploi et aux relations sociales et qui augmentent la probabilité d’engendrer des effets néfastes sur la santé physique et psychologique des personnes exposées. »

Ces « facteurs » incluraient, par exemple :

  • La charge de travail
  • L’autonomie décisionnelle
  • La reconnaissance
  • Le soutien social du supérieur et des collègues
  • Le harcèlement psychologique
Des activités de prévention doivent être mises en place pour en protéger les travailleurs des risques psychosociaux.

On précise aussi, dans la nouvelle loi, que l’employeur doit prendre des mesures pour protéger les travailleurs et travailleuses de différents types de violences auxquelles ils seraient exposés dans leur milieu de travail, incluant les violences conjugales, familiales ou sexuelles.

Imaginons maintenant le cas d’une employée en télétravail vivant une situation de violence conjugale… L’employeur doit-il intervenir, et si oui, comment?

La CNESST précise que « l’employeur est tenu de prendre [des mesures nécessaires pour assurer la protection d’un employé] lorsqu’il sait ou devrait raisonnablement savoir [que celui-ci] est exposé à cette violence. » Il faut donc agir.

En assemblée parlementaire, ce cas très précis a été soulevé. Une solution proposée était de donner accès à l’employée à un lieu de travail hors de son domicile. Assurément, les experts en santé-sécurité et en ressources humaines de même que les gestionnaires d’entreprise devront travailler en étroite collaboration afin d’identifier les mesures de gestion des risques psychosociaux les plus pertinentes et les plus adaptées à leur milieu de travail.

Volets imputation et réparation

Un règlement sur les maladies professionnelles remplace désormais l’annexe 1 du RSST (Règlement sur la santé et la sécurité du travail). Bien que son contenu soit similaire, mentionnons la reconnaissance de certaines maladies, notamment le parkinson, la maladie de Lyme et le choc post-traumatique, comme maladies professionnelles.

Véritable casse-tête pour bien des employeurs, la gestion des dossiers d’accidents de travail n’a pas gagné en simplicité dans la nouvelle loi 59, et un bon partenaire de gestion de dossiers peut s’avérer un choix judicieux.

Comment se conformer?

La création de cette nouvelle loi, qui comporte un peu moins de 300 articles, a consisté en un travail colossal, qui a nécessité d’entendre et de considérer les avis de nombreux acteurs du milieu. Nous y avons nous-mêmes participé lors de comités consultatifs, à titre d’experts en prévention.

Il n’est donc pas attendu du grand public qu’il maîtrise parfaitement la nouvelle loi du jour au lendemain. L’entrée en vigueur de ses nouvelles exigences a plutôt été répartie sur plusieurs années, de manière à laisser le temps aux entreprises de s’y conformer graduellement. Il sera important pour les employeurs de s’informer des dates butoirs importantes (ce résumé de la CNESST est un bon outil de départ).

Restez également à l’affût de la création de règlements clarifiant certains flous dans la loi, comme en vous abonnant à l’infolettre de Santinel, si ce n’est pas déjà fait!

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